Pour des interprétations artificielles
Première séance du séminaire organisé conjointement par le CSLF et la MSH Mondes “Interprétations artificielles”
En présentiel et en visioconférence
Lien de visioconférence
Séminaire Interprétations artificielles – CSLF x MSH Mondes
Jeudi, 13 février · 15:30 à 17:00
Informations de connexion Google Meet
Lien de l’appel vidéo : https://meet.google.com/qov-tvpa-mwm
Adam Faci et Julien Schuh : Introduction – Vers une architecture d’agents IA d’interprétation littéraire
Avec le récent développement des modèles génératifs, lʼutilisation de lʼIA en études littéraires se popularise. Notre travail propose un pas de côté vis à vis de toutes les approches quantitatives qui dominent dans les études littéraires, et plus généralement dans les humanités numériques, et qui visent à automatiser lʼannotation et lʼanalyse de documents autrement effectués à la main. Nous cherchons plutôt à privilégier le ludique et lʼétonnant, en nous demandant si des agents alimentés par les capacités des nouveaux outils dʼIA, et capables de communiquer entre eux, peuvent suivre divers programmes de lecture et produire des interprétations complexes. Comment modéliser les processus interprétatifs pour les rendre reproductibles de manière automatisée par des agents cognitifs non humains ? Nous tenterons de répondre à cette question en tentant de recréer une partie des mécanismes de réception d’un lecteur modèle de polars, à partir d’un corpus de romans policiers réunis dans le cadre de l’ANR POLARisation (https://polarisation.hypotheses.org/). Pour répondre à ces défis, nous proposons une approche fondée sur la simulation d’une multitude de programmes de lecture, en fonction de rôles, d’objectifs et de cadrages différents. L’expérimentation de ces programmes sur le corpus de romans, grâce à diverses chaînes de traitement basées sur les techniques de RAG et les LLMs, permet de construire des agents capables de poser des hypothèses interprétatives et de les affiner au fur et à mesure de leur lecture. Ce processus imite la démarche herméneutique, en produisant des modélisations dynamiques du texte reposant sur la reconfiguration des informations apportées au fil de la lecture.
Adam Faci, Docteur en informatique sur la représentation, la simulation et lʼexploitation de connaissances sous forme de graphes conceptuels, est post-doctorant sur lʼusage des LLMs en SHS au sein de l’Huma-Num Lab (CNRS). Ses travaux actuels autour de lʼutilisation éthique des LLMs et leur évaluation, lʼamélioration des techniques de RAG par une pré-clusterisation, et expérimentations de chaines de traitements pour la reconnaissance dʼimage.
https://www.huma-num.fr/adam-faci/
Julien Schuh est professeur de Littérature française (CSLF, Université Paris Nanterre) et directeur adjoint de la MSH Mondes. Il co-pilote du Consortium-HN pictorIA (https://pictoria.hypotheses.org/) consacré à l’application d’outils d’intelligence artificielle dans le domaine de la culture visuelle en SHS. https://cv.hal.science/julien-schuh
Alberto Romele: L’herméneutique numérique : non pas une discipline, mais une « ressemblance de famille »
Bien qu’il n’existe pas de discipline autonome appelée « herméneutique numérique », une série de publications récentes a employé cette expression dans des contextes et domaines variés, allant de la philosophie des techniques aux humanités numériques, en passant par les critical code studies. Cette intervention a pour objectif de mettre en lumière, au-delà des différences apparentes, la « ressemblance de famille » qui unit les travaux ayant mobilisé ce concept. L’intervention sera structurée en trois parties. Dans un premier temps, nous proposerons un excursus historique sur l’herméneutique en tant que discipline consacrée à l’élaboration des règles pour une interprétation correcte des textes et des productions culturelles en général. Une attention particulière sera accordée à deux principes fondamentaux : le principe de distanciation critique et le principe d’articulation entre méthode et vérité. Dans un second temps, nous examinerons la littérature existante ayant mobilisé la notion d’herméneutique numérique, pour démontrer que ces deux principes sont effectivement omniprésents, bien qu’appliqués dans des contextes très divers. Nous tenterons également de systématiser le concept ses usages, en distinguant entre plusieurs sens de l’herméneutique numérique : déconstructif, épistémologique, ontologique, anthropologique et social-culturel. Enfin, dans une troisième et dernière partie, nous présenterons quelques applications empiriques que nous avons proposées ces dernières années dans le champ de l’herméneutique numérique.
Alberto Romele est maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Institut de la communication et des médias de l’université Sorbonne Nouvelle, membre du laboratoire IRMÉCCEN. Ses recherches portent sur l’herméneutique numérique et les imaginaires sociotechniques de l’intelligence artificielle. Il est l’auteur de deux monographies : Digital Hermeneutics (2020) et Digital Habitus (2023), publiées chez Routledge. En français, il a coédité plusieurs ouvrages, dont Imaginaires Technologiques (avec François-David Sebbah, Les Presses du Réel, 2023).